18 septembre 2013
De passage à Paris, Richard Branson a confirmé à Claire Nouvian au cours d’un entretien privé qu’il s’engageait aux côtés de BLOOM et de la Deep Sea Conservation Coalition pour défendre la biodiversité des océans profonds, aujourd’hui menacée par les filets de pêche industrielle qui raclent les fonds jusqu’à 2000 mètres de profondeur.
Lundi 16 septembre, des chercheurs et des personnalités publiques et politiques internationales se sont réunis à Paris pour faire connaître les impacts des chaluts industriels sur les écosystèmes multimillénaires des grandes profondeurs océaniques.
Gilles Bœuf, Président du Muséum national d’Histoire naturelle a rappelé que les océans profonds avaient évolué depuis des millions d’années sans être impactés par les activités humaines, le professeur Les Watling de l’Université de Hawaï que les océans profonds abritaient un nombre d’espèces sans doute supérieur à celui de la forêt amazonienne et que les coraux profonds détenaient le record de longévité animale, certaines espèces pouvant vivre plusieurs milliers d’années. Rainer Froese de l’Institut GEOMAR de Kiel a insisté sur le fait que la pêche réalisée dans les eaux de surface pouvait et devait être durable, mais qu’en aucun cas, la pêche en eaux profondes pourrait atteindre la durabilité étant donné ses impacts sur les habitats marins et le gâchis d’espèces. En effet, pour 3 espèces ciblées par les chalutiers profonds, plus de 100 autres sont capturées et rejetées mortes à la mer. Philippe Cury, directeur de recherche à l’IRD (Institut de Recherche pour le Développement) a mis en garde sur les effets indésirables qui résultent de la destruction des écosystèmes et des liens complexes qui unissent le vivant, en citant les invasions de méduses dans les océans comme exemple.
Tous ont rappelé que ces pêches n’existeraient pas si elles n’étaient pas subventionnées et ont comparé le chalutage profond, la méthode de pêche utilisée par les neuf navires encore impliqués dans les captures d’espèces profondes en France, à des bulldozers dont les impacts écologiques étaient inacceptables. Au total 300 chercheurs dans le monde ont signé un appel pour soutenir la proposition de la Commission européenne d’interdire le chalutage profond.
Les invités politiques, Pascal Durand, secrétaire national d’EELV, Jean-Paul Chanteguet, député socialiste, Président de la Commission Développement durable de l’Assemblée nationale et les députés européens socialistes Kriton Arsenis et Ulrike Rodust ont insisté sur l’urgence à prendre des mesures « extraordinaires pour des espèces extraordinaires. »
L’interdiction du chalutage profond sera bientôt votée au Parlement européen. La France est le principal frein à l’adoption de cette mesure, le Ministre délégué à la pêche, Frédéric Cuvillier, étant un élu du port industriel de Boulogne-sur-Mer, historiquement impliqué dans le développement de la pêche profonde.
Des personnalités telles que Nicolas Hulot, Allain Bougrain-Dubourg, Marielle de Sarnez, Daniel Cohn-Bendit ou le dessinateur Jul ont apporté leur soutien à cette mobilisation qui a été entendue par les médias. Le sera-t-elle par le chef d’Etat à quelques jours de la Conférence environnementale ? Jusqu’ici, silence à l’Elysée et au Ministère de l’Ecologie sur la question. Comme le déploraient les invités réunis le 16 septembre, les intérêts particuliers continuent à prévaloir sur l’intérêt général ». Un arbitrage politique est pourtant nécessaire.
Le rapporteur du règlement « pêche profonde au Parlement a rappelé que l’interdiction du chalutage profond ne constituait pas un précédent qui viserait à interdire tout le chalutage en surface. Il a de ce fait conclu qu’il se battait le plus souvent contre un « fantôme », celui de l’interdiction du chalutage partout alors que rien de tel n’a jamais été envisagé.