08 septembre 2016
Depuis plus de 20 ans, les subventions favorisant la surcapacité de pêche (construction et modernisation de navires) ont été identifiées comme l’une des principales raisons de la destruction de la biodiversité marine, de la surexploitation des stocks de poissons et de la disparition continue des emplois.
Toutes les discussions internationales relatives à la surpêche, dont la France est partie prenante, aboutissent à la même conclusion : seule la suppression de ces aides « néfastes » permettra d’éradiquer ce fléau mondial.
Pourtant, en 2007 par exemple, la pêche française réalisait un chiffre d’affaire d’un peu plus d’un milliard d’euros et recevait au minimum l’équivalent en aides publiques ! Or en dehors de cette année de référence, étudiée par la Cour des comptes, l’omerta et l’opacité à propos des aides publiques allouées au secteur de la pêche sont totales. C’est pourquoi BLOOM a, depuis plusieurs mois déjà, engagé un travail de recherche au long cours pour enfin y voir clair et disposer d’informations précises qui permettront de changer durablement la donne.
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Des aides au moins équivalentes au chiffre d’affaire du secteur… Cela vous surprend ? Nous aussi ! Pourtant, cette estimation a été établie par la Cour des comptes en 2010 et publiée dans un rapport qui a sévèrement épinglé la gestion des subventions allouées au secteur de la pêche en France. Ce bilan au vitriol – que BLOOM avait alors analysé – a disparu du radar. Mais il a refait surface en juillet 2013, fuité par le Nouvel Obs. Amputé toutefois de la partie XI qualifiée de « confidentielle ». Gardée sous clef ou détruite ? Mystère.
Toujours est-il que ce document explosif était alors venu conforter le diagnostic posé quelques années auparavant par un chercheur de l’IFREMER particulièrement remonté, Benoît Mesnil. Selon lui, la débauche de subventions octroyées au secteur depuis des dizaines d’années, n’a poursuivi qu’un seul objectif : maintenir la paix sociale coûte que coûte. À l’époque, ce rapport avait également corroboré les conclusions tirées par BLOOM, lors de son analyse de la performance économique des flottes pratiquant le chalutage en eaux profondes.
À ceux qui évoquent un « secret de polichinelle », BLOOM rétorque qu’il s’agit plutôt d’une véritable omerta ! Impossible en effet de connaître la nature et le montant exacts de toutes les aides allouées à ce secteur en France – celles attribuées par les collectivités territoriales étant littéralement qualifiées de « trou noir » par les commissaires de la Cour des comptes –, tant le déficit de pilotage est sévère.
Et gare à celui qui veut y mettre le nez, car les obstacles qui se dressent sont nombreux, à commencer par ceux mis en œuvre par les principaux intéressés : les pouvoirs publics eux-mêmes. On ne peut pas dire, en effet, que ces derniers brillent par leur transparence. Rappelez-vous, en février dernier, le Secrétaire d’État aux Transports, Alain Vidalies, sortait littéralement de ses gonds en pleine séance à l’Assemblée nationale lors de l’examen d’un amendement déposé par les députés EELV et UDI demandant que transparence soit faite en matière de subventions à la pêche.
Le Secrétaire d’État a eu beau ne pas apprécier la démarche, la Commission d’Accès aux Documents Administratifs (CADA) n’en a pas moins donné raison à BLOOM en émettant un avis favorable à la saisine déposée pour obtenir de la Direction des pêches maritimes et de l’aquaculture (DPMA) qu’elle nous communique des fichiers exploitables. En somme, le b.a.-ba de la transparence administrative pour un pays qui prendra tout de même la tête, dès cet automne, du Partenariat pour un Gouvernement Ouvert, une initiative internationale pour l’ouverture des données et la transparence de la vie publique !
Faire enfin le jour sur les aides publiques allouées au secteur de la pêche en France depuis ces vingt dernières années. Voilà l’objectif que s’est fixé BLOOM et pour lequel, votre soutien et votre mobilisation, seront indispensables si nous voulons, une nouvelle fois, porter de véritables changements.