27 septembre 2016
Anticor, BLOOM, CCFD-Terre Solidaire, Collectif Roosevelt, Justice et Paix, ONE, Oxfam France, ActionAid France Peuples Solidaires, Réseau Foi et Justice Afrique Europe, Sherpa.
Le projet de loi relatif à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique, ou « Loi Sapin 2 », sera examiné en deuxième lecture par l’Assemblée nationale à partir de ce mercredi 28 septembre. L’occasion pour le collectif d’organisations de la société civile, spécialiste de la lutte contre la corruption et de l’évasion fiscale de faire le point sur les avancées du texte et ses manquements, notamment sur : la protection des lanceurs d’alerte, l’agence anti-corruption, la transaction pénale, l’encadrement des lobbies et le reporting pays par pays public.
Les organisations de la société civile Anticor, BLOOM, CCFD-Terre Solidaire, Collectif Roosevelt, Justice et Paix, ONE, Oxfam France, ActionAid France Peuples Solidaires, Réseau Foi et Justice Afrique Europe, Sherpa
« Il faut saluer la définition plus large de lanceurs d’alerte, introduite par la Commission des lois mercredi dernier. Contrairement à ce qui a été voté en première lecture, cette définition permettra de couvrir des cas comme celui d’Antoine Deltour et il faut à tout prix la maintenir en l’état. Néanmoins, pour que ce statut soit réellement protecteur, il importe notamment de pénaliser les actes qui visent à empêcher l’action d’un lanceur d’alerte », affirme Éric Alt d’Anticor.
« Le Projet de loi n’offre pas suffisamment de garantie d’indépendance à la future Agence française anti-corruption, notamment parce qu’elle est placée sous la double tutelle des Ministères de la Justice et des Finances. Il est particulièrement important que les députés instaurent des règles de déontologie et suppriment les missions de conseil de l’Agence : il n’est pas possible pour une Agence anti-corruption d’effectuer à la fois des missions de contrôle et de conseil ! De plus nous regrettons que n’ait pas été réintroduite dans le texte la possibilité pour les associations agréées pour la lutte contre la corruption d’effectuer des signalements auprès de l’Agence pour des faits commis par des entreprises», indique Laetitia Liebert de Sherpa.
« Nous renouvelons notre demande pure et simple de supprimer l’article introduisant une possibilité pour les entreprises de transiger avec la justice dans les cas de corruption. Cette possibilité, étendue par le Sénat et entérinée par la Commission des lois au trafic d’influence et au blanchiment de fraude fiscale, représente un précédent grave dans le fonctionnement de la justice française. Non seulement les effets en termes de lutte contre la corruption restent à démontrer, mais cela renvoie aux citoyens l’image d’une justice « à deux vitesses »! En fait, il s’agira pour les entreprises d’acheter une immunité pénale », déclarent les ONG Anticor et Sherpa .
« La Commission des lois a réintégré quelques mesures essentielles concernant l’encadrement des activités d’influence des représentants d’intérêts. Néanmoins, le registre de transparence qui serait créé ne concerne que les activités passées des lobbyistes. Ce n’est en aucun cas un outil dynamique permettant de savoir qui influence la fabrication de la loi en temps utile. En outre, les représentants d’intérêts ne sont aucunement tenus de rendre publiques les informations qu’ils transmettent aux décideurs publics et le texte est totalement dépourvu de modalités concrètes permettant de mettre en œuvre la traçabilité des influences au niveau normatif. Le texte va dans le bon sens mais il s’arrête au milieu du gué et ne permettra pas d’honorer la promesse présidentielle : « Les citoyens sauront qui est intervenu, à quel niveau, auprès des décideurs publics, pour améliorer, corriger, modifier une réforme, et quels ont été les arguments utilisés »[1] », regrette Claire Nouvian, Présidente de BLOOM.
« Nous dénonçons avec force le reporting « à trous » proposé par la Commission des lois inefficace dans la lutte contre l’évasion fiscale : en effet, le texte propose que les entreprises ne soient obligées de publier des informations concernant leurs activités et les impôts qu’elles payent uniquement dans les pays où elles ont un nombre minimum de filiales ! Ce qui reviendrait, par exemple, si ce seuil est fixé à deux filiales, à exclure 37 des 98 pays où Total est présent ! » déclarent les ONG CCFD-Terre Solidaire, Oxfam France et ONE.
Nos organisations appellent les députés à rectifier le tir et à tenir compte de ces observations afin de permettre à ce texte de remplir son objectif initial : améliorer l’efficacité de l’arsenal législatif français de lutte contre la corruption et pour la transparence. Il s’agit de la dernière occasion avant la fin de la législature.
Anticor : Eric Alt
CCFD-Terre Solidaire : Karine Appy
BLOOM : Claire Nouvian
Oxfam France : Eleonora Trementozzi
Sherpa : Lisa Rieux
[1] Discours du 20 janvier 2015 aux corps constitués http://www.elysee.fr/declarations/article/discours-a-l-occasion-des-v-ux-aux-corps-constitues-et-aux-bureaux-des-assemblees/.