12 mai 2021
Résumé
– La Commission européenne a publié le 12 mai les résultats de son évaluation du Règlement de 2016 de l’UE sur la pêche en eaux profondes, concluant que le règlement est « conforme à ses objectifs », mais soulignant néanmoins le manque de progrès dans la fermeture de zones à la pêche de fond afin de protéger les coraux d’eaux profondes, d’autres espèces et les écosystèmes marins vulnérables là où leur présence est avérée ou probable dans les eaux de l’Union européenne.
– La Commission et les États membres européens doivent maintenant et sans plus tarder mettre en œuvre pleinement et de toute urgence cette obligation-clé du règlement.
Le règlement de l’UE sur la pêche en eaux profondes, adopté en 2016 après plusieurs années d’intenses négociations, interdit le chalutage profond au-delà de 800 mètres dans les eaux de l’UE. Il exige également la fermeture au chalutage de fond des zones situées au-delà de 400 mètres de profondeur, dans lesquelles la présence d’écosystèmes marins vulnérables (EMV) tels que les coraux profonds, les éponges et autres écosystèmes biologiquement diversifiés est avérée ou probable. Ces zones comprennent des monts sous-marins, reconnus comme étant des oasis de biodiversité et autour desquels certaines espèces de poissons se rassemblent pour frayer ou se nourrir.
Bien qu’aucun rapport officiel des États membres ne soit disponible, il ressort de l’évaluation que l’interdiction du chalutage profond au-delà de 800 mètres est respectée et contribue à la conservation de certains stocks de poissons d’eau profonde. Toutefois, aucun progrès n’a été réalisé à ce jour en ce qui concerne la fermeture des zones EMV à la pêche profonde situées au-delà de 400 mètres, alors que le règlement exigeait que ces fermetures soient mises en place à partir de 2018. Les résultats de l’évaluation publiés le 12 mai 2021 soulignent la nécessité urgente de mettre en œuvre cette disposition cruciale du règlement.
L’évaluation de la Commission a été menée à la suite d’une enquête publique sur le règlement, réalisée en ligne l’année dernière, dans laquelle la grande majorité des répondants soutenaient l’interdiction du chalutage profond au-delà de 800 mètres et déclaraient que les EMV devraient être protégés et que davantage de restrictions sur le chalutage de fond devraient être mises en place.
Début 2021, le Conseil international pour l’exploration de la mer (CIEM) a publié son avis scientifique sur les zones où la présence d’EMV est avérée ou probable et qui devraient être interdites à la pêche au chalutage profond. Cet avis contient toutefois un certain nombre d' »options », certaines offrant une protection moins ambitieuse que d’autres. La Commission et les États membres de l’UE sont maintenant tenus d’agir sur la base de cet avis et d’examiner les options du CIEM. BLOOM et la Deep Sea Conservation Coalition (DSCC) exhortent la Commission européenne et les États membres à soutenir les options qui protègent le mieux les écosystèmes profonds dans les eaux de l’UE.
« La Commission européenne et les États membres se sont constamment engagés à stopper et à inverser la perte de biodiversité. C’est l’occasion idéale de faire un pas significatif en passant de la parole aux actes et en protégeant les écosystèmes d’eaux profondes au bénéfice de la biodiversité et de la lutte contre le changement climatique« , a commenté Matthew Gianni, cofondateur de DSCC.
« Les monts sous-marins, en particulier, sont des oasis reconnus de biodiversité. En les fermant à la pêche au chalut de fond au large des côtes irlandaises, françaises, espagnoles et portugaises, l’UE se rapproche de l’issue du travail qu’elle a commencé il y a 15 ans avec la fermeture de tous les monts sous-marins à la pêche au chalut de fond dans les eaux entourant les Açores, Madère et les îles Canaries« , a ajouté Matthew Gianni.
Ursula von der Leyen et les chefs d’État de tous les États membres ont récemment signé le Leaders’ Pledge for Nature qui vise à stopper et à inverser la perte de biodiversité d’ici à 2030 lors du Sommet des Nations unies sur la biodiversité qui s’est tenu en septembre 2020. Le programme décennal des Nations unies pour la restauration des écosystèmes débute cette année, ce qui renforce encore les engagements pris par l’UE pour protéger les écosystèmes marins vulnérables de l’impact destructeur du chalutage profond. Les fermetures contribueraient également à préserver la capacité des fonds marins à stocker le carbone dans les sédiments des eaux profondes, un service écosystémique important mis en évidence dans une étude publiée en mars 2021 dans Nature.
« Nous exhortons le gouvernement français à soutenir l’approche la plus ambitieuse pour la protection de ces zones critiques de biodiversité en eaux profondes et à prendre au sérieux la mise en œuvre du Règlement européen sur la pêche en eaux profondes« , a déclaré Frédéric Le Manach, directeur scientifique de l’association BLOOM, qui s’est battue huit ans pour obtenir l’interdiction du chalutage profond en Europe.
La Commission européenne est censée publier sa proposition officielle (un acte d’exécution) dans le courant de l’année pour les fermetures de zones EMV au chalutage de fond. Cet acte d’exécution devra ensuite être approuvé par les États membres de l’Union européenne.
Un communiqué de BLOOM et de la DSCC.